21 juillet 2015

Quel gouvernement économique pour la zone euro? Suite.

Platier, 21 juillet 2015.
Ce matin, Laurent Fabius a donné sur une radio une réponse à l’une des questions contenues dans mon message d’hier en indiquant que le contrôle démocratique de la zone euro pourrait être confié aux députés européens des pays membres de la zone plutôt qu’à une assemblée nouvelle.

Par contre, il n’a pas répondu à une question qu’à tort j’ai omis de poser hier. Quid de l’Exécutif ? L’expérience de l’eurogroupe que nous venons de vivre a démontré une fois de plus les impasses de l’intergouvernementalisme, chaque ministre ajoutant ses exigences sans vision globale. Ne conviendrait-il pas de désigner un ministre des finances qui serait en même temps vice-président de la Commission sur le modèle de la Haute Représentante pour la politique étrangère ? Président l’eurogroupe avec une autorité renforcée, il serait bien placé pour assurer une relation harmonieuse entre une zone euro définie comme une avant-garde et l’UE dans son ensemble. En présidant avec succès les derniers sommets de l’euro, Donald Tusk vient de montrer qu’une personnalité venant d’un pays n’appartenant pas à la zone euro pouvait agir dans l’intérêt de l’un et l’autre cercle, donc dans l’intérêt commun européen.   

20 juillet 2015

Quel gouvernement économique pour la zone euro?

            Platier, 20  juillet 2015
            Le président Hollande a saisi l’occasion que lui offrait la crise grecque pour formuler dans le journal du dimanche une proposition visant à corriger les failles révélées dans l’architecture de la zone. Intéressante, car elle vise une sortie par le haut, cette proposition n’en soulève pas moins plusieurs questions.
1.     Sur la notion de gouvernement économique. Cette formulation chère à la diplomatie française depuis Mitterrand et Bérégovoy, laisse supposer qu’un gouvernement économique pourrait être séparé de la politique. Plus fondamentalement se pose la question de savoir si la France serait disposée à se soumettre à des décisions contraignantes qui pourraient lui être imposées pour assainir ses finances publiques et rétablir sa compétitivité ?
2.     Sur la création envisagée d’un budget propre à la zone euro, Serait-il alimenté par des contributions nationales ou par des impôts européens qui, pour être acceptables, devraient se substituer à des impôts nationaux ? A quelles politiques communes serviraient ces ressources ? Le budget ne devrait-il pas prendre appui sur une mobilisation de la capacité d’emprunt de la zone, ce qui supposerait la création d’un Trésor européen ?
3.     Sur le contrôle démocratique dont la crise a démontré l’insuffisance, est-il judicieux de créer un parlement européen bis ? Ne serait-il pas plus simple de prévoir la possibilité pour les députés européens des pays membres de la zone euro de délibérer et de statuer sur le budget mais également sur les politiques propres à la zone euro ? Ne pourrait-on admettre la participation des autres députés à la délibération sans droit de vote, ce qui préserverait les droits des pays extérieurs à la zone mais appelés ou non à la rejoindre, ce qui répondrait à l’une des revendications de David Cameron ?

4.     Sur le recours à une assemblée composée de parlementaires nationaux. Paradoxalement une telle assemblée serait moins « européenne » que l’actuel Parlement européen, les parlementaires nationaux ne disposant que d’un mandat européen indirect que leur donne le contrôle des gouvernements. Pourrait-on réunir dans la même assemblée, comme certains l’envisagent, députés européens et parlementaires nationaux sans ouvrir une querelle de légitimité et sans affaiblir le contrôle démocratique que l’on souhaite renforcer ?

15 juillet 2015

Sorte de crise?

            Platier, 15 juillet.
            Les Grecs échappent à la faillite au prix d’une mise en tutelle rendue inévitable par leur comportement. Combien d’entre eux sont conscients d’avoir bénéficié de la solidarité de l’Union ? Voilà un thème qu’aurait pu traiter François Hollande se félicitant à juste titre de son rôle de médiateur. Le gouvernement économique qu’il envisage est un très ancien projet de la diplomatie française décrédibilisé par notre incapacité à respecter les décisions communes. Ce n’est pas d’un gouvernement intergouvernemental dont a besoin la zone euro mais, comme l’a dit récemment Trichet d’un arbitrage parlementaire qui pourrait être assuré par les députés européens des pays membres et d’un ministre des finances, vice-président de la Commission sur le modèle de la Haute représentante pour la politique étrangère. La négociation avec le Royaume-Uni pourrait être l’occasion d’un pas en avant dans une plus forte intégration de la zone euro à laquelle les Britanniques ne semblent pas opposés dès lors que leurs intérêts seraient sauvegardés.
            Les interrogateurs du Président ne l’ont pas interrogé sur le,défi migratoire toujours aussi pressant. Après avoir bruyamment refusé les quotas de demandeurs d’asile et de réfugiés proposés par la Commission, la France et l’Allemagne les ont acceptés en ce qui les concerne, ce dont il y a lieu de se féliciter. L’accord sur le nucléaire iranien obtenu après dix ans de négociations auxquelles l’UE a pris une part importante devrait permettre un renforcement de la lutte contre Daech devenu le principal facteur d’instabilité en Syrie-Irak et en Libye et par là même l’incitation à chercher refuge en Europe.

            Rarement l’Europe avait été à ce point le centre du débat politique, suivant des lignes de clivage inhabituelles. En dépit des frustrations provoquées par la lenteur de ses décisions et sa relative impuissance, le sentiment d’appartenance commune devrait s’en trouver renforcé.

06 juillet 2015

Un double échec

            Les deux défis qui faisaient l’objet de mon dernier message n’ont pas été relevés. Le refus d’une répartition équitable des réfugiés et demandeurs d’asile, notamment de la part de pays bénéficiant largement de la solidarité communautaire est tout aussi désolant que la totale incompréhension mutuelle qu’illustre le référendum grec. L’ancien président de la BCE Jean-Claude Trichet propose de donner un pouvoir d’arbitrage à une instance réunissant parlementaires européens et nationaux. Rien ne permet d’espérer que les gouvernements se plieraient à cet arbitrage non prévu par les traités dont on sait la difficulté de les modifier. Une nouvelle crise s’ouvre qui démontrera une fois de plus combien il est difficile de concilier puissance collective et maintien des souverainetés nationales.