28 décembre 2011

Le message de Vaclav Havel

Platier. 28 décembre 2011. Dans le Monde daté du 23 décembre, Jacques Rupnik, directeur de recherches à Sciences Po et ancien collaborateur de Vaclav Havel, nous rappelle le message que nous laisse ce grand Européen. En mars 1999, il préconisait devant le sénat français une constitution européenne ainsi définie : un texte court, inspiré et intelligible à tous, qui inviterait à une « parlementarisation » et à une « fédéralisation » des institutions européennes.
A l’heure où les princes qui nous gouvernent, écrit Rupnik, sont amenés par la crise de l’euro à faire « du fédéralisme par inadvertance », on ne peut s’empêcher de penser que si au lieu d’un pensum confus et indigeste … que personne n’a lu, les Européens s’étaient mis en quête d’un « père fondateur » capable de rédiger un texte concis, fort et acceptable à tous, sur les raisons d’être du projet européen, y compris son « fédéralisme » comme ambition politique plutôt que comme gestion de la dette, ils auraient pu en confier la rédaction à Vaclav Havel lui-même… On ne saurait mieux dire.
Bonne année 2012 !

21 décembre 2011

Ce qui manque à l'UE pour rétablir la confiance

Platier. 21 décembre 2011. En qualifiant le futur traité d’intergouvernemental, les Etats contournent la règle d’unanimité mais soulignent en même temps leur refus de transférer à l’UE de nouvelles compétences et plus encore de créer un pouvoir nouveau dont la légitimité pourrait concurrencer les légitimités nationales. La situation d’endettement des membres de la zone euro n’est pas aussi mauvaise que celle des Etats-Unis, du Royaume-Uni ou du Japon. Mais sans budget commun significatif, sans trésor public commun, sans fiscalité commune, sans armée et sans gouvernement, autrement dit sans un minimum d’Etat, les chances qu’a l’UE de rétablir la confiance dans sa monnaie demeurent aléatoires et plus encore celles d’être considérée comme une puissance d’avenir dans le monde de demain.

12 décembre 2011

Après l'accord du 9 décembre

Paris, 12 décembre. Ci-dessous mon analyse pour ARRI des accords de vendredi dernier. Je doute qu’ils suffisent à mettre fin à la crise. J’observe aussi que les deux principaux candidats à la présidentielle font campagne sur la défense de notre souveraineté et le refus de donner plus de moyens et de compétences à l’UE.
Observatoire de l’Europe 12 décembre 2011
La crise financière qui frappe l’Europe s’est aggravée au point que la survie de l’euro a été ouvertement mise en cause. Trois pays parmi les plus en difficulté ont changé de gouvernement, en Grèce, en Italie sous la pression de l’endettement et en Espagne à la suite d’élections.
La séquence vient d’aboutir à l’accord conclu le 9 décembre à Bruxelles, à partir de propositions arrêtées quelques jours plus tôt par le couple « Merkozy ». Un accord obtenu au petit matin, pour la première fois sans recherche de l’unanimité à tout prix. L’essentiel de l’accord consiste à renforcer, dans chacun des Etats membres, la discipline budgétaire en introduisant dans leur ordre juridique constitutionnel une « règle d’or » de retour à l’équilibre. Il n’est pas facile de porter un jugement objectif sur cet accord conclu après une phase d’extrême dramatisation et présenté comme historique.

Les éléments positifs me paraissent les suivants :
- Fermeté opposée aux prétentions britanniques de choisir ce qui leur convient et de se tenir à l’écart de tout le reste. Il est remarquable que Cameron n’ait été suivi par aucun des pays hors zone euro, bien que la République tchèque et la Hongrie aient marqué un temps d’hésitation. Ainsi devrait-on éviter une coupure avec les pays d’Europe centrale, notamment avec la Pologne très hostile à une Europe à deux niveaux.
- Acceptation générale, y compris par la France, d’une vraie discipline budgétaire. Les sanctions seront semi-automatiques, c'est-à-dire décidées par la Commission, le Conseil ne pouvant s’y opposer qu’à la majorité qualifiée. On a enfin pris conscience de ce que l’on ne pouvait accumuler indéfiniment déficits et dettes.
- Espoirs, qui restent à confirmer, d’une harmonisation plus poussée des politiques économiques, sociales et fiscales.
- Solidité du couple franco-allemand parvenu à une position commune malgré de profondes divergences de culture politique et institutionnelle.

Les incertitudes ne peuvent être ignorées :
- Comment un traité intergouvernemental ne liant pas tous les Etats membres de l’UE pourra-t-il s’insérer dans le système juridico-institutionnel communautaire ? Or il est prévu que la Cour de Justice contrôlera les « règles d’or » adoptées par chaque pays et que la Commission en contrôlera le respect. M. Cameron a déjà annoncé qu’il s’opposera à l’utilisation des institutions de l’UE. Pourquoi n’avoir pas eu recours à la formule des coopérations renforcées ?
- Comment éviter l’engrenage récessif qui parait devoir résulter de l’application générale et simultanée de mesures de rigueur, en l’absence de soutiens à la croissance ?
- Pourra-t-on infliger des sanctions financières à l’encontre de pays en très grande difficulté ?
- Les ressources du Fonds européen de stabilité, éventuellement secondé par le FMI, seront-elles suffisantes pour faire face à une éventuelle impossibilité où pourraient se trouver les pays les plus endettés de se refinancer sur les marchés en 2012 ? Ne devra-t-on pas avoir recours à la Banque centrale qui gèrera le FESF, malgré les interdits juridiques et politiques réaffirmés par Mario Draghi, nouveau président de la BCE. Celle-ci pourra financer les banques mais non les Etats.

Au-delà de ces incertitudes, se pose un problème politique majeur, celui de l’évolution du système européen face au triple défi du fédéralisme, de la démocratie et de la puissance.
Au moment où l’intergouvernementalisme semble triompher, le fédéralisme est sous toutes les plumes, à vrai dire plus souvent associé à la notion de contrainte qu’à celle d’avancées positives. La France, comme les autres contributeurs nets refuse toute augmentation du budget commun.
La démocratisation nécessaire d’une union plus intégrée oppose ceux qui considèrent que la démocratie ne peut s’exercer que dans le cadre national et ceux qui souhaitent que le Parlement soit partie prenante dans l’élaboration du nouveau traité, ou qui envisagent à terme un Exécutif européen élu au suffrage universel, ainsi que vient de le proposer la CDU lors de son congrès de Leipzig.
Le défi de la puissance n’est enfin pas près d’être relevé alors qu’existe un large consensus pour souhaiter l’émergence d’un pôle européen dans la mondialisation. L’Allemagne craint les engagements risqués, comme on l’a vu en Libye, la France ne conçoit un pouvoir européen qu’interétatique donc faible et incapable de mobiliser un soutien populaire.

En définitive, ce qui est le plus décevant, à mes yeux, dans l’accord du 9 décembre, c’est ce qui ne s’y trouve pas et dont apparemment on n’a même pas parlé : un budget commun qui donnerait à l’UE, non par des ressources nouvelles mais par le transfert d’impôts nationaux, les moyens qui lui manquent pour conduire ses politiques, des euro-obligations dont l’objet serait de financer des programmes transnationaux emblématiques dans les domaines de la recherche, des réseaux, du développement durable, pour équilibrer les effets récessifs des programmes de rigueur. La faute récurrente des élites européennes est de proposer une construction dont ils reconnaissent la nécessité, sans faire le moindre effort pour lui donner une image attractive susceptible de recueillir l’appui populaire. Sommes-nous à l’abri d’une révolte sociale ?

En dehors de l’accord du 9 décembre, deux sujets méritent de retenir l’attention : Durban et la Croatie. Sauvetage in extremis des engagements de Kyoto à Durban, sans progrès nouveau alors que la menace se confirme, voie ouverte à la Croatie alors que le statut de candidat n’a pas été accordé à la Serbie à la suite de sérieux incidents provoqués par la minorité serbe du Nord du Kosovo.

02 décembre 2011

Deux réponses inappropriées

Paris, 2 décembre. Le refus du fédéralisme par le président Sarkozy tout comme le refus de toute contrainte budgétaire supranationale par François Hollande sont un nouvel exemple de la persistance d’illusions françaises bien partagées. Un gouvernement européen exclusivement intergouvernemental serait assimilé à un directoire franco-allemand ou plutôt germano-français et ne permettrait aucun débat démocratique ouvert. L’acceptation de décisions à la majorité qualifiée par les Etats suppose qu’elles ne résultent pas seulement de rapports de force, mais qu’elles soient adoptées à partir de propositions émanant d’une instance indépendante des intérêts nationaux ainsi que l’avait prévu le traité de Rome. La proposition allemande d’élire le président de l’Europe au suffrage universel est pour le moins prématurée. Elle marque cependant l’attachement de notre principal partenaire à cette culture communautaire qui semble avoir disparu chez nous. La gravité de la crise rend également dangereux le refus par les socialistes d’une discipline budgétaire réellement contraignante. Le temps n’est plus où les prêteurs se contentaient de déclarations d’intention dont l’expérience montre qu’elles sont rarement suivies d’effet. Nous demandons avec raison aux Allemands plus de solidarité. Ils ont raison de nous demander plus de discipline.

16 novembre 2011

Un saut fédéral pour sortir de la crise ou de Védrine à Schäuble

Paris 16 novembre. Dans un article paru le 4 novembre dans Libération l’ancien collaborateur de François Mitterrand et ministre des Affaires étrangères de Jacques Chirac et de Lionel Jospin renouvelle l’attaque contre les fédéralistes à laquelle il s’était déjà livré dans le Monde daté du 29 juin et dans de multiples interventions sur les chaînes de radio et de télévision. Agaçé par les appels à la fédéralisation de l’Union européenne, voire aux Etats-Unis d’Europe, qui se multiplient en France et en Allemagne, Hubert Védrine qualifie le fédéralisme de mot-valise aux significations variables. Il accepte la version qui consiste à renforcer l’intégration économique et budgétaire autour du duo intergouvernemental franco-allemand mais rejette tout transfert de compétence à des institutions supranationales existantes ou en projet, qu’il s’agisse du Parlement, de la Commission ou d’un éventuel ministre européen des finances que propose Michel Barnier.
Plusieurs considérations militent cependant en faveur d’un saut fédéral. Elles tiennent à une triple exigence : efficacité dans la prise de décision, rétablissement de la confiance et légitimation démocratique.
L’épisode de la Slovaquie menaçant de bloquer le plan de sauvetage de la Grèce a démontré une fois de plus l’absurdité du maintien de la règle d’unanimité. La lenteur des décisions qui en résulte est à l’origine du discrédit dont souffre l’Union aussi bien auprès des peuples que des marchés. Le rétablissement d’une stricte discipline budgétaire demandé à juste titre par l’Allemagne devra, pour être supportable et acceptable, s’accompagner de la création d’un vrai budget commun alimenté par une fiscalité commune, d’un Trésor commun avec une capacité d’emprunt, l’un et l’autre au service d’une ambitieuse politique de retour à l’emploi par l’innovation et l’écologie. Ce sont autant de réformes qui seront déjà difficiles à obtenir par des votes majoritaires mais que la règle du veto rend inatteignables.
Le rétablissement de la confiance dans l’avenir de l’euro imposera tôt ou tard une mutualisation des dettes à laquelle l’Allemagne ne pourra continuer indéfiniment à s’opposer. Elle exigera en contrepartie une harmonisation rigoureuse des politiques budgétaires. Un nouveau traité sera nécessaire. Ce devrait être l’occasion de créer ces ressources propres sans lesquelles le programme 20 – 20 de modernisation connaîtrait le sort de l’agenda de Lisbonne. Les Britanniques qui redoutent les conséquences, notamment pour leurs banques, de l’aggravation de la crise ne pourront s’opposer au nouveau traité mais exigeront des dérogations qui accentueront leur marginalisation. Les autres pays non membres de la zone euro devront choisir entre le statut dérogatoire du Royaume-Uni ou un engagement européen confirmé leur donnant voix au chapitre dans le gouvernement de la zone euro.
C’est enfin sur l’exigence démocratique que se situe la ligne de partage entre les fédéralistes et les souverainistes. Pour ces derniers, parmi lesquels il n’est pas abusif de ranger Hubert Védrine, la démocratie ne peut s’exercer qu’au niveau national. Ainsi l’ancien ministre préfère-t-il la contrainte d’une rigueur imposée sans contrepartie par le partenaire allemand, dans un dialogue exclusivement intergouvernemental, à celle qui résulterait d’un débat politique ouvert au sein des institutions communautaires et en premier lieu du Parlement. Encore conviendrait-il pour que ce débat soit ressenti positivement par les opinions que l’on cesse d’utiliser l’Europe comme un nouveau FMI imposant l’austérité aux peuples et que l’on permette aux institutions de jouer un rôle qui ne soit pas exclusivement punitif. En multipliant les fonctions et les présidences, en renonçant à réduire le nombre des commissaires, on a affaibli l’ensemble des institutions. Le duo Merkel-Sarkozy, « Merkozy » comme disent les Anglais, a pris le pouvoir et obtenu, non sans atermoiements, quelques résultats. Ce duumvirat, qui irrite de plus en plus, ne saurait constituer une solution durable.
L’Europe n’a aucune chance de devenir un pôle de puissance capable de défendre ses valeurs et ses intérêts dans le monde des Etats-continents si elle ne parvient pas à développer le sentiment d’appartenance à une entité commune, amorce d’un patriotisme européen. L’émergence d’une démocratie européenne suppose l’organisation de débats électoraux transnationaux donnant naissance à une Autorité légitimée par le suffrage universel de peuples. Le ministre allemand Wolfgang Schäuble, poids lourd du cabinet Merkel, vient de nous le rappeler en recommandant dans un article publié dans le Monde des 13 et 14 novembre une réforme qui ferait faire un pas immense à la démocratie européenne : l’élection au suffrage universel du président de la Commission, proposition entérinée au congrès de la CDU-CSU. « Ce serait une vraie révolution. On aurait ainsi un gouvernement européen. » écrit cet homme d’Etat vieil ami de la France. Le même Schäuble, avec son collègue au Bundestag Karl Lamers, avait lancé en septembre 1994 un appel à la France en faveur d’un noyau fédéral qui resta sans réponse. La crise nous offre une occasion de réparer l’erreur de 1994. Saurons-nous la saisir ?

09 novembre 2011

Deux enseignements de la crise

Paris 9 novembre. La prise de pouvoir du couple germano-français au détriment des processus institutionnels communautaires peut paraître plus efficace. Elle n’est en fait qu’un palliatif à l’absence d’autorité exécutive européenne légitimée par les peuples. C’est cette absence qui est à l’origine de la méfiance persistante des marchés. La mise en commun des monnaies ne sera définitive que le jour où elle s’appuiera sur un minimum de structures fédérales : un budget alimenté par des impôts fédéraux dont la taxe sur les transactions financières, une agence émettant des emprunts au nom de l’Europe en vue de stimuler la croissance et l’emploi. Tant que ces progrès n’auront pas été accomplis, une lourde menace continuera de peser sur l’acquis européen.
Autre fausse solution très en vogue ces jours : un nouveau traité entre les seuls membres de la zone euro en vue d’instituer une gouvernance européenne de ladite zone. Cela équivaudrait à jeter dans les bras des eurosceptiques britanniques les pays qui, comme la Pologne, n’appartiennent pas à la zone euro mais souhaitent la rejoindre et donc participer à sa gestion. Un nouveau traité est nécessaire mais il devra être négocié et signé entre les 27 quitte à autoriser des dérogations en distinguant le cas des pays qui souhaitent participer à l’union monétaire et ceux qui ne le souhaitent pas et prennent le risque de la marginalisation.

04 novembre 2011

Une antipédagogie

Platier, 4 novembre. Ce qui me parait le plus grave dans la tragicomédie à laquelle nous assistons depuis une semaine n’est pas le risque d’éclatement de la zone euro auquel je n’ai jamais cru mais l’encouragement que les commentateurs ne cessent de donner aux tendances naturelles des peuples à attribuer aux autres la cause de leurs malheurs. Les Allemands enragent de devoir payer pour les Grecs mais ignorent qu’ils sont de loin les principaux bénéficiaires du marché unique. Leur retard à décider a aggravé la crise. Les Grecs se plaignent de l’austérité mais refusent de s’attaquer à leurs secteurs privilégiés (Armée, Eglise, armateurs) au demeurant peu mis en cause par les gouvernements européens. Les Français se refusent à rétablir leur propre équilibre budgétaire et croient pouvoir s’abriter sous le parapluie allemand. Tous ont fermé les yeux sur le comportement aberrant des Grecs de peur de devoir eux-mêmes justifier leurs errements. Les petits s’irritent de subir un directoire germano-français de plus en plus arrogant. L’opinion française s’irrite du poids excessif des nouveaux Etats membres dont elle n’a jamais approuvé l’adhésion. Ne parlons pas des Anglais qui détestent par principe tout ce qui vient de Bruxelles. Tout cela ne sera corrigé que le jour où on en reviendra à la bonne vieille méthode communautaire qui assure le meilleur équilibre possible et si l’on se décide à compléter les mesures nécessaires d’assainissement par des politiques de croissance, ce qui veut dire, en clair, moins de consommation et plus d’investissements.

25 octobre 2011

Le beurre et l'rgent du beurre. Au bord du gouffre ?

Platier 25 octobre. Sarkozy a exprimé ce que ressentent beaucoup d’Européens en rappelant à Cameron qu’il ne pouvait se tenir à l’écart de la solidarité qui unit les membres de la zone euro tout en prétendant participer, à part entière, aux décisions qui la concernent. Une distinction s’impose entre les pays qui comme la Pologne souhaitent rejoindre la zone euro dès qu’ils en rempliront les conditions et ceux qui s’en tiennent volontairement à l’écart. Ne conviendrait-il pas d’utiliser la formule de la coopération renforcée prévue dans le traité de Lisbonne pour unir et organiser les pays membres de la zone euro et ceux qui veulent la rejoindre ? Le sommet de demain donne lieu à la dramatisation qui permettra de glorifier les sauveurs d’une Europe supposée au bord du gouffre. Mon pronostic est qu’un compromis sera obtenu mais qu’il ne sera qu’un pas modeste, donc provisoire, vers la sortie de crise.

21 octobre 2011

De l'Europe interétatique à l'Europe fédérale. Leçon d'une nouvelle crise

Platier, 21 octobre. La difficulté qu’éprouvent Allemands et Français, sans parler des autres, à s’accorder sur le Fonds européen de stabilité financière montre une fois de plus les limites d’un système mieux défini par interétatique que par le terme habituel d’intergouvernemental. L’exigence d’unanimité, source d’impuissance, est inévitable dès lors que sont en cause les finances des Etats. Le remède à l’impuissance congénitale de l’UE en matière financière n’est pas à rechercher seulement dans l’amélioration des mécanismes de décision mais dans la création d’outils européens indépendants des structures nationales. L’Europe demeurera un nain politique dont l’incapacité à exister, à décider, à agir fait la risée et maintenant la colère du reste du monde redoutant la contagion de la méfiance et le risque d'une récession mondiale, tant qu’elle ne disposera pas d’un budget commun alimenté par des ressources propres et d’un Trésor capable d’emprunter sous sa propre signature. Voilà pourquoi les partisans d’une évolution en direction du fédéralisme doivent apporter autant d’attention à la création d’outils communs au service des politiques communes qu’à la réforme des mécanismes institutionnels.

08 octobre 2011

De l'union monétaire à l'union politique

Paris, 8 octobre. Les créateurs de la monnaie unique pensaient qu’elle conduirait à l’union politique. Leur espoir a des chances de se réaliser, non dans le cadre d’une évolution rationnelle interrompue par les référendums de 2005, mais à la faveur d’une crise que nul n’avait prévue. Il est significatif que, mise à part l’extrême droite, nul ne propose la sortie de l’UE ou l’abandon de l’euro. Le principe d’un gouvernement économique longtemps contesté est désormais admis. Il reste à l’organiser en tenant compte des exigences démocratiques. Les contraintes budgétaires et fiscales qu’il implique ne seront acceptables que si elles s’accompagnent d’un débat démocratique qui devrait associer Parlement européen et parlements nationaux. Il reste aux partis de gouvernement à s’organiser de manière à présenter des programmes transnationaux lors des prochaines élections européennes. La proposition d’un deuxième bulletin de vote en vue de l’élection d’une trentaine de députés sur des listes transnationales soutenue par le député britannique Andrew Duff y contribuerait. Elle ne semble malheureusement pas encore réunir une majorité au sein du Parlement. Quoi qu’il en soit, que nous le voulions ou non, les grands choix de politique économique se situeront désormais au plan européen.

04 octobre 2011

Une éclaircie à Berlin

Paris, 4 octobre. Plusieurs voix, que l’on n’attendait pas, se sont fait entendre en Allemagne, celles des anciens chanceliers Schmidt, Schröder et Kohl, celle de l’ancien ministre des Affaires étrangères, Joschka Fischer, celle même d’une ministre de Mme Merkel, dont on dit qu’elle est parmi les successeurs possibles, préconisant « les Etats-Unis d’Europe ». Le vote massif du Bundestag en faveur du plan d’aide à la Grèce, le 29 septembre, venant après les échecs électoraux du parti libéral qui avait misé sur l’euroscepticisme confirme l’attachement de l’Allemagne à la construction européenne dont certains sondages d’opinion permettaient de douter. Aussi est-il question d’un nouveau traité conclu entre les seuls membres de la zone euro en vue d’assurer sa gouvernance économique. Nos gouvernements sont-ils prêts à accepter des décisions à la majorité qualifiée sur leur politique budgétaire et fiscale ? Voilà une question qui devrait être posée aux candidats à la présidentielle.

21 septembre 2011

Faillite de l'Europe des Etats

Paris,21 septembre. Je reprends mon blog interrompu alors que l'Union européenne traverse sa plus grave crise. Il s'agit plus d'une crise de gouvernance que d'une crise financière. La dette grecque, démesurée au regard du produit national grec ne représente qu'une fraction infime du produit de l'ensemble de la zone euro. Une décision rapide de solidarité en échange de réformes contrôlées, faisant porter le poids principal sur l'armée, l'église, les armateurs et les propriétaires et non sur le petit peuple aurait coûté moins cher, découragé la spéculation et aurait été plus équitable, donc mieux acceptée. La crise montre une fois de plus la fragilité d'une union monétaire ne correspondant pas à un Etat ou à une entité politique capable de prendre des décisions dans des délais brefs et reconnue comme légitime par les peuples. Il se peut que la crise permette de franchir un pas vers cette Europe fédérale annoncée par Robert Schuman il y a plus de 60 ans. Mais cela suppose une transformation profonde des institutions et des mentalités qui demandera du temps. Or le temps presse !

03 août 2011

Réponse à Hubert Védrine

Platier, 3 août. Dans le Monde daté du 2 août, l’ancien ministre Hubert Védrine manifeste une fois de plus son allergie au fédéralisme, abusivement assimilé à la capitulation devant les marchés et les agences de notation. Ce gardien du temple mitterrandien s’agace de voir des personnalités de plus en plus nombreuses des milieux politiques, économiques ou médiatiques constater que l’Europe, et tout particulièrement la monnaie unique, ne peut avoir d’avenir que fédéral. Mais l’analyse de Védrine comporte un élément que les fédéralistes auraient tort de négliger. Il est vrai que la légitimité démocratique la plus forte est aujourd’hui encore celle des gouvernements nationaux, seuls en mesure de justifier les efforts, voire les sacrifices, rendus nécessaires par des années de gaspillage et d’imprévoyance. L’erreur de Védrine est ailleurs. Il ignore ou feint d’ignorer qu’une Europe qui aurait l’audace de combiner mutualisation des dettes et discipline commune pourrait utiliser sa capacité d’emprunt intacte, non seulement pour garantir les dettes souveraines de ses Etats membres, mais pour financer un ambitieux plan de recherche et d’innovation, donc, à terme, de compétitivité et d’emploi. Il ignore surtout ou feint d’ignorer qu’une Europe intergouvernementale, sans Exécutif politique légitimé par le suffrage direct ou indirect des citoyens et sans acceptation franche du principe majoritaire, ne peut être qu’une Europe de l’impuissance aussi bien pour ce qui est de l’économie et de la monnaie que pour la sécurité intérieure ou les relations internationales. En dépit de referendums qui ont condamné l’impuissance de l’Europe plus que ses excès de pouvoir, les peuples, mieux que les gouvernants, comprennent la nécessité d’une vraie Union. Encore faudrait-il leur montrer ce que l’Union peut faire pour eux et pas seulement l’austérité temporaire et hélas inévitable qu’elle impose à certains d’entre eux.

16 juillet 2011

Le fédéralime seule chance de sauver l'euro ?

Platier, 16 juillet. Une vérité dérangeante pour tous ceux qui avaient enterré l’objectif d’une Europe démocratique, c'est-à-dire fédérale, s’impose à la faveur de la crise grecque. Derrière le problème du surendettement de la Grèce, de l’Irlande, du Portugal, apparait celui, beaucoup plus difficile, d’une politique monétaire unique ne pouvant convenir à des pays aux structures économiques et aux cultures politiques différentes. Faute d’un rapprochement des politiques économiques, sociales, budgétaires et fiscales conduit par un ministre européen de l’économie et des finances disposant d’un budget commun de grande ampleur, il n’y a aucune chance que les pays en difficulté, y compris le nôtre, puissent rattraper un retard de compétitivité qu’ils ne peuvent plus corriger par la pratique ancienne des dévaluations compétitives. Il suffirait que les dirigeants français et allemands fassent un pas dans cette direction pour que la confiance dans le projet européen soit rétablie.

09 juillet 2011

Vive la Pologne !

Platier, 9 juillet. Le Premier ministre polonais Donald Tusk a présenté devant le Parlement européen le programme de sa présidence semestrielle avec un mélange réconfortant d’optimisme et d’ambition. Après la période malheureuse des frères Kaczynski à l’euroscepticisme déclaré, la Pologne fait figure de bon élève de la classe:taux de croissance en hausse, chômage en baisse. Le peuple polonais, avec 80% d’opinions favorables, se range parmi les plus europhiles. Avocat de la solidarité envers la Grèce, d’un renforcement du budget, du maintien d’une politique agricole forte, d’une politique énergétique commune, de progrès en matière de défense, la Pologne est aujourd’hui, plus que la France ou l’Allemagne, un moteur de l’intégration. Elle n’hésite pas à critiquer l’affirmation des points de vue nationaux aux dépens de l’intérêt commun. Elle n’est cependant pas elle-même au dessus de tout reproche. Sa richesse en charbon explique sans la justifier sa timidité environnementale.

03 juillet 2011

L'Europe en danger

La Cadière, 29 juin. Quelle que soit l’habileté des gouvernements à imaginer des solutions à la crise de la dette grecque qui ne consistent qu’à retarder l’échéance, l’Europe est en danger. Elle est en danger car elle est en passe de perdre l’appui des peuples sans lequel son avenir n’est pas assuré. Une importante partie du peuple grec se ressent comme victime de l’UE et du FMI, avec une hostilité particulière envers l’Allemagne qui va jusqu’au rappel des dommages subis lors du dernier conflit mondial. Les peuples du Nord appelés à venir au secours de la Grèce en ont assez de payer pour la légèreté et l’imprévoyance de ceux du Sud. Cette double hostilité réciproque est redoutable. Elle rappelle les heures sombres de l’Histoire de notre continent. Elle devrait appeler une grande initiative audacieuse : la mutualisation des dettes, au moins pour une large part, en contrepartie d’un effort grec mieux partagé. Qu’attend-on pour mettre à contribution le budget militaire grec, en pourçentage un des plus hauts d’Europe, les armateurs dont nous apprenons qu’ils échappent à l’impôt et même l’Eglise qui devrait donner l’exemple de la solidarité et qui en a les moyens ?
Diffusé depuis Platier le 3 juillet.

19 juin 2011

Trichet occupe une place laissée vide par les politiques

Platier, 19 juin. En proposant un fédéralisme budgétaire et mieux encore un ministre européen des finances, en s’opposant à la banqueroute d’un Etat membre de l’eurozone, Jean-Claude Trichet, se fait le défenseur de l’intérêt de l’Union, sans hésiter si nécessaire à s’opposer aux gouvernements nationaux. N’a-t-il pas tenu tête à Berlin sur la solidarité envers la Grèce et contre un défaut aux conséquences redoutables et à Paris sur la nécessité d’une discipline budgétaire plus rigoureuse et mieux respectée ? Ce faisant, le président de la Banque centrale, fort de la réactivité montrée au plus fort de la crise, en agissant aux limites de ses pouvoirs quand le salut commun l’exigeait, occupe la place laissée quasi vide par un président de la Commission sans énergie et un président du Conseil européen qui, à peine nommé, s’est interdit toute prise de position personnelle, réduisant ainsi son rôle à celui d’un super – secrétaire général. On comprend que l’idée d’un vrai président de l’Europe fasse de nouveaux adeptes, le dernier en date étant l’un des leaders du centre gauche italien, l'ancien président du conseil Massimo d’Alema.

12 juin 2011

Comment sauver la Grèce ?

Paris, 12 juin. Je prie mes lecteurs d’excuser cette nouvelle interruption due à des mystères qui m’échappent. Un conflit peu visible mais très vif oppose Angela Merkel et la Banque centrale au sujet de la Grèce. Alors que l’Allemagne plaide pour une restructuration de la dette impliquant un sacrifice de la part des banques créditrices, la BCE redoute l’atteinte qui serait ainsi portée à la crédibilité de l’euro. En fait, chacun sait que la Grèce ne pourra pas rembourser l’intégralité de sa dette et moins encore supporter les taux d’intérêt qui lui sont imposés. Enorme au regard du PIB grec, la charge est dérisoire au regard de celui de l’UE. La solution qui devrait finir par s’imposer consisterait dans le rachat de la dette grecque soit par la BCE, soit par le nouveau fonds européen de stabilité financière. En contrepartie, la Grèce devrait poursuivre ses réformes mais sans se voir imposer des mesures socialement insupportables, son remboursement étant étalé sur une longue période et assorti de taux d’intérêts modérés. Quant aux banques, elles pourraient être fermement invitées à accepter une réduction drastique de leur rémunération en contrepartie de la récupération intégrale du capital.

10 juin 2011

La chute de Strauss-Kahn, un coup dur pour l'Europe

Paris, 24 mai. De la foule de commentaires qui ont accompagné la chute du directeur du FMI, je retiens l’observation suivant laquelle DSK était la seule personnalité susceptible de convaincre la Chancelière allemande de la nécessité de faire preuve de solidarité pour sauver les pays membres de la zone euro en difficulté, fût-ce de leur faute. Sa disparition dans les circonstances aussi affligeantes qu’invraisemblables intervient au moment où la pression des marchés s’exerce de nouveau sur les pays endettés. Si sympathique soit-elle, la révolte pacifique des jeunes Espagnols pourrait, si elle devait perdurer et s’étendre, ajouter l’Espagne à la liste des candidats au renflouement, ce qui en augmenterait sérieusement le coût. Quoi qu’il en soit le cours de l’euro se maintient, malgré une baisse légère ces derniers jours, à un niveau qui dépasse largement la parité des pouvoirs d’achat : 1,40 $ au lieu de 1,20. Voilà qui devrait faire réfléchir ceux qui annoncent la fin de l’euro

Michel Barnier pour un président unique de l'UE

Paris, 11 mai. Dans une déclaration faite à Berlin et rapportée dans la Croix du 10 mai, Michel Barnier s’est prononcé en faveur d’un président de l’UE qui serait désigné par un congrès réunissant le parlement européen et des représentants des Parlements nationaux. Il présiderait à la fois le Conseil et la Commission. Cette proposition rejoint celle que j’avais faite lors des travaux de la Convention Giscard et qui avait été reprise par Pierre Lequiller,représentant de l'Assemblée nationale à la Convention. L’éclatement de l’Exécutif européen est en effet l’une des principales sources de faiblesse de l’Europe. A l’intérieur, elle ne facilite pas l’émergence d’un sentiment d’allégeance. A l’extérieur, elle donne une image confuse de l’Union. La désignation par un congrès ou par codécision du Conseil et du Parlement ne devrait marquer qu’une étape en attendant l’élection au suffrage universel. Voilà une question à poser aux futurs candidats à la présidentielle de 2012.

Le Sommet de la honte

Paris, 2 mai. Au moment où la mort de Ben Laden marque un succès important dans la lutte contre le terrorisme mais risque d’exacerber la haine de ses partisans, le spectacle qu’offre l’Europe face aux révoltes arabes est affligeant. Au lieu des manifestations de solidarité que devrait susciter le ralliement des peuples de la rive Sud aux valeurs démocratiques, les nations européennes rivalisent dans l’égoïsme et la courte vue. En témoigne ce honteux sommet de Rome où dirigeants français et italiens s’entendent pour remettre en cause la liberté de circulation des personnes dans l’espace Schengen sans proposer la moindre mesure de solidarité envers les malheureux Tunisiens privés subitement des recettes touristiques qui limitaient leur misère. Seule une aide massive de l’UE justifierait en contrepartie l’exigence d’un contrôle strict des départs vers l’Europe. En attendant l’Europe devrait recevoir et se répartir un nombre de réfugiés sans commune mesure avec celui des réfugiés libyens accueillis par la Tunisie. Encore faudrait-il que l’Europe se dote d’un budget en rapport avec ses responsabilités sinon mondiales, du moins régionales. Que sont devenus les avocats de l’Union pour la Méditerranée ?

Elections européennes, une proposition intéressante

Platier, 26 avril. Les quatre principaux groupes du Parlement européen se sont mis d’accord pour utiliser le droit de proposition que leur donne le traité de Lisbonne concernant le mode d’élection. La principale réforme proposée consiste à donner un deuxième bulletin aux électeurs en vue de l’élection de 25 députés dans une circonscription couvrant l’ensemble du territoire de l’Union. Les partis seraient naturellement conduits à placer sur leurs listes des personnalités ayant une audience dépassant les frontières de leur pays. Ainsi la campagne pourrait prendre le caractère d’un débat européen au lieu d’être l’addition de débats nationaux. Les élus sur ces listes paneuropéennes seraient des candidats en quelque sorte pré-désignés par les électeurs pour faire partie de la Commission dont la nomination intervient après l’élection du Parlement qui a désormais le pouvoir d’élire le président et d’approuver l’ensemble du collège. Cette réforme que j’avais proposée jadis au sein du Mouvement européen serait sans doute de nature à limiter l’abstention. Ce projet, bien que porté par un député britannique, Andrew Duff, appartenant au groupe des libéraux et d’orientation fédéraliste, a malheureusement toute chance de se heurter à un veto de Londres. Encore devrait-il être mieux connu et soutenu dans les pays qui souhaitent un renforcement de la démocratie européenne.

Immigration. Où est l'Europe ?

Paris, lundi 17 avril. Il existe un consensus autour de l’idée que l’immigration est un problème européen mais, dans la pratique, c’est le chacun pour soi qui domine. Le spectacle des querelles franco-italiennes à propos de Vintimille est scandaleux. Au refus de solidarité dans la prise en charge des réfugiés affluant à Lampedusa, les Italiens répondent en délivrant des permis de séjour. Le nombre de personnes susceptibles d’être accueillies dans l’Union et d’y bénéficier de la libre circulation et de la possibilité d’occuper un emploi devrait faire l’objet d’une décision prise à la majorité, en tenant compte, s’agissant des Tunisiens, de ce que leur pays a accueilli plusieurs centaines de milliers de réfugiés venant de Libye. Il conviendrait aussi d’harmoniser les droits sociaux des migrants et de prévoir un financement au moins partiel sur le budget de l’UE. Celle-ci devrait utiliser sa capacité de négociation pour obtenir des pays de la rive sud un contrôle des départs et l’acceptation des réadmissions en conditionnant toute aide de sa part ou de celle des Etats membres. A force de démontrer leur impuissance collective et d’étaler leurs querelles, les gouvernements alimentent un euroscepticisme destructeur. Le succès des « vrais Finlandais » en est le dernier exemple d’autant plus désolant qu’il vient d’un pays jusqu’à présent exemplaire.

Crise de l'euro ou crise de la solidarité ?

Platier 10 avril. Monnaie stable et recherchée, monnaie forte, trop forte pour les exportateurs mais protectrice pour les consommateurs de produits pétroliers, l’euro n’est nullement en crise. Ce qui est en crise, c’est la solidarité qui, si elle s’était manifestée rapidement aurait coûté moins cher, et qui aurait dû conduire à prêter aux pays en difficulté à des taux plus favorables, correspondant aux taux obtenus par le fonds de secours créé par l’UE. La manifestation organisée à Budapest par la Confédération européenne des syndicats est venue rappeler une évidence. Le coût de l’assainissement ne peut reposer exclusivement sur les pays en difficulté. Les gouvernements qui ont fermé les yeux sur les fraudes grecques ou sur le comportement aberrant des banques irlandaises ont leur part de responsabilité, tout comme les banques qui ont prêté à tout va. En venant au secours de la Grèce, de l’Irlande et du Portugal, l’Allemagne, la Grande-Bretagne et la France protègent leurs banques. Qui osera le rappeler à une opinion allemande devenue eurosceptique ? Où est le temps ou l’Allemagne proposait à la France un noyau dur fédéral ?

Une lettre au Monde

Paris, 4 avril . Voici la lettre que j’adresse au courrier des lecteurs du Monde.
L'Europe de la défense serait, selon Alain Frachon, morte et enterrée en Libye (le Monde daté du 1er avril). Mais, pour être morte encore eut-il fallu qu'elle ait connu auparavant un commencement d'existence ! Certes le traité de Lisbonne reconnait à l'Union européenne une compétence " pour définir et mettre en œuvre une politique étrangère et de sécurité commune, y compris la définition progressive d'une politique de défense commune ". Ainsi le récent accord franco-britannique sur la défense ne fait aucune référence à l'Europe. Pour que naisse une Europe de la défense, il faudrait qu'existe une fédération d'Etats et de citoyens conscients de l'unité de leur destin et désireux d'exister dans la mondialisation. Alain Frachon a raison de souligner que la Libye était l'occasion d'un premier pas. Elle n'a pas été saisie mais d'autres se présenteront. Ne désespérons pas qu'un jour des dirigeants plus éclairés comprennent et fassent comprendre à leurs peuples, dans ce domaine aussi, la nécessité de l'union.

29 mars 2011

Deux lectures stimulantes

Paris, 29 mars. Mes excuses tout d’abord pour le retard d’envoi de mon dernier message imputable à une fausse manœuvre de ma part.
Laurent Cohen-Tanugi est un des observateurs les plus perspicaces de la construction européenne. Son dernier ouvrage « Quand l’Europe s’éveillera » (Grasset, 9 €) constate en 128 pages le fiasco de l’Europe des Etats et dénonce l’illusion suivant laquelle la coopération entre Etats pourrait, mieux que l’intégration supranationale, faire avancer l’union des peuples européens.Ce n'est pas l'excès d'intervention de l'Union qui rend l'Europe impopulaire mais l'impuissance à laquelle la condamnent des dirigeants nationaux inconséquents. Les seuls domaines où l’Europe parvient à exister dans la mondialisation et à défendre ses intérêts sont ceux qui ont été fédéralisés : la régulation de la concurrence et du marché unique, la politique monétaire et la politique commerciale internationale. Quand les Etats voudront l’Europe, ils devront lui donner les moyens de son ambition, en assumant une relance de l’intégration : budget permettant de financer un plan de relance de dimension européenne, alimenté par des ressources propres, abandon du veto pour la ratification des traités, création d’une vie politique européenne en émancipant le mode d’élection du Parlement européen de logiques purement nationales.
A ceux qui seraient démoralisés par le sévère diagnostic de Cohen-Tanugi, je conseille la lecture d’un autre petit livre « Un petit coin de paradis » d’Alain Minc (Grasset 9 €)
Qu’il s’agisse de leur modèle social, de leurs libertés, de leur démocratie, de leurs institutions, celles des Etats mais aussi celles de leur Union si décriées, les Européens ignorent leur exceptionnelle réussite. L’apport le plus original de Minc consiste dans une saisissante évolution comparée de la démocratie sur les deux rives de l’Atlantique. Naguère en avance sur l’Europe sur à peu près tous les terrains, les Etats-Unis apparaissent aujourd’hui retardataires. En témoignent la peine de mort, la justification de la torture, l’enseignement du créationnisme, le financement privé illimité des campagnes électorales, l’élection de Bush arbitrée par la Cour suprême sans recompte des voix de la Floride, la résistance aux régulations financières, l’élargissement sans précédent des échelles de revenus, l’absence jusqu’à la récente législation d’Obama, si violemment contestée, d’un cadre général de protection sociale. « Les Européens peuvent, pour la première fois de leur histoire, prétendre qu’ils n’ont « ni Dieu, ni maître ». Ils sont bien les seuls au monde à connaître cette situation bénie. Mais inconscients, une fois de plus, de leur propre réussite, ils n’en ressentent aucune fierté. »
Je publierai prochainement dans la Revue Futuribles et dans les Cahiers d’ARRI une recension plus substantielle de ces deux petits bréviaires stimulants et complémentaires.

25 mars 2011

Quelques questions et une suggestion

Paris, 20 mars 2011.
Merci d’abord aux jeunes animateurs du Taurillon pour leurs encouragements à l’issue du Conseil national du Mouvement européen, hier après-midi, auxquels je suis très sensible.
L’intervention en Libye décidée par le Conseil de Sécurité marque un progrès vers cette gouvernance mondiale sans laquelle l’avenir de la civilisation, sinon de l’espèce humaine ne saurait être à long terme garanti. Elle n’en pose pas moins de sérieuses questions.
Comment ne pas éprouver un malaise face au deux poids deux mesures ? Pourquoi les révoltés de Bahreïn n’ont-ils pas droit à la même protection que ceux de Libye ? On connait la réponse : l’Arabie saoudite et son pétrole pèsent trop lourd.
Que reste-t-il de la politique étrangère et de sécurité commune après l’abstention de l’Allemagne ? Alain Juppé, dont on s’accorde à reconnaître les mérites et une autorité personnelle qui manquait à la plupart de ses prédécesseurs, a-t-il déployé tous les efforts possibles pour éviter ce très grave échec de l’Europe organisée ?
Cette affaire montre la nécessité d’une réflexion sur la conciliation nécessaire des politiques nationales et de celle de l’Union. Ne pourrait-on admettre la possibilité de décisions majoritaires permettant une action de l’Union en tant que telle, tout en permettant aux Etats minoritaires de ne pas y prendre part, en tout ou en partie ?

12 mars 2011

Succès européen, inquiétudes britanniques

Paris, 12 mars. L’accord conclu hier au Sommet des Dix-sept importe autant par son cadre limité aux membres de la zone euro que par son contenu, encore que celui-ci ne soit pas négligeable. Un premier pas vers une vraie coordination des politiques économiques est franchi faisant la part plus belle à l’assainissement nécessaire des finances publiques qu’au soutien non moins nécessaire à la croissance. On ne peut que se féliciter de la fermeté opposée à l’Irlande dont le nouveau gouvernement refuse tout relèvement de son impôt sur les sociétés et douter que les concessions consenties à la Grèce suffisent à lui éviter un défaut de paiement. La lecture du dernier n° du célèbre hebdomadaire The Economist révèle l’inquiétude des dirigeants anglais face au renforcement d’un eurogroupe d’où les exclut leur refus non seulement de la monnaie unique mais de tout progrès de l’intégration.

04 mars 2011

L'Europe au défi des révolutions arabes

Paris 4 mars. La vague qui soulève les peuples arabes, du Maghreb à la péninsule arabique, est à la fois un succès et un défi pour l’Europe. Succès de nos valeurs – pour la première fois, la fameuse rue arabe ne se dresse pas contre l’impérialisme occidental mais contre ses propres dictateurs et exploiteurs – défi de faire entendre une voix forte parce qu’unie et surtout de répondre aux attentes de l’autre rive en se gardant de l’ingérence comme de l’indifférence. La juste voie est difficile à définir. Comment ne pas accueillir une partie de ceux qui chercheront asile sur nos côtes quand ils mesureront l’abîme qui risque de s’ouvrir bientôt entre les espoirs nés de la liberté et les contraintes impitoyables de l’économie et de la démographie ? Comment répartir la charge plus équitablement ? Comment obtenir, question jamais posée alors qu’elle est la seule solution rationnelle et humaine, comment obtenir que les immenses richesses de la péninsule arabique soient mises au service de l’ensemble de la région ? Beau sujet qui devrait donner lieu à un dialogue entre l’UE et les Etats-Unis dont on sait à quel point leur importe l’avenir du royaume saoudien. Autre sujet sur lequel les Européens devraient se faire entendre : le scandale que constitue le récent véto opposé par les Etats-Unis à une résolution, par ailleurs unanime, du Conseil de Sécurité condamnant la poursuite de la colonisation des territoires palestiniens.

28 février 2011

Hommage à deux amis disparus

Paris, 28 février. Deux amis nous ont quitté ces derniers jours, Monique Hunault et Bino Olivi. Monique avait fait partie de ces fonctionnaires militants qui avec François Fontaine animateur du Bureau d’information de la Commission à Paris ont tant fait pour populariser l’idée européenne dans la France des années soixante et soixante-dix. Après sa retraite, Monique poursuivit des activités militantes à l’Association Jean Monnet et à la Fondation Jean Monnet de Lausanne, à Femmes d’Europe et à l’AFEUR dont elle fut l’un des membres les plus actifs. Je connaissais Bino Olivi depuis ma nomination au cabinet de Robert Marjolin en juillet 1962. Brillant Porte-Parole de la Commission pendant une vingtaine d’années, il fut ensuite chargé auprès de l’ambassadeur Jurgensen du projet de Fondation européenne de la Culture seule proposition du Premier Ministre belge Tindemans retenue par le Conseil européen avant d’être torpillée par la conjonction des Néerlandais et d’un diplomate du cabinet du président Giscard d’Estaing. Après ce qui avait été pour lui une cruelle déception, Bino se fit le très remarquable historien de la construction européenne dans son ouvrage "l’Europe difficile" régulièrement mis à jour. Lui aussi membre de l’AFEUR, il participait à nos déjeuners lors de ses séjours à Paris.

19 février 2011

Nouveaux méfaits de l'intergouvernementalisme

Platier, 19 février. Les efforts louables des Allemands et des Français pour rapprocher leurs positions sur la gouvernance économique de l’Union risquent d’être voués à l’échec par le choix des deux principaux pays de la zone euro d’exclure tout recours à la méthode communautaire et de s’en tenir à des accords intergouvernementaux. Cette affaire paraîtra bien abstraite aux non spécialistes. Elle est en réalité très concrète et hautement politique. En privant la Commission de son rôle de proposition puis de gestion, Français et Allemands ont réussi à mécontenter la plupart de leurs partenaires, y compris la Pologne dont le Secrétaire d’Etat aux Affaires européennes vient de rappeler l’attachement de son pays à la méthode communautaire qui garantit la prise en compte des intérêts de tous et, grâce au vote à la majorité, la prise de décision. Ce n’est pas de cette manière que l’on convaincra les pays moins peuplés d’accepter des disciplines parfois douloureuses telles que l’abolition de l’indexation des salaires ou le recul de l’âge de la retraite. Enfin on doit s’attendre à une réaction fermement négative du Parlement européen.

11 février 2011

Deux leçons à tirer des crises tunisienne et égyptienne

Paris, 11 février. La première leçon est l’universalité de l’aspiration des peuples à la liberté que nient parfois les tenants de la real politik. Le rôle de l’Europe, comme celui des Etats-Unis, plus puissants mais moins proches géographiquement et psychologiquement, est d’encourager une évolution sans violence vers la liberté des élections, l’alternance politique et l’état de droit sans exclure des contacts avec toutes les parties, y compris ceux des islamistes qui se réclament de la démocratie. L’opinion publique est à juste titre déçue du profil bas de la diplomatie européenne face aux révolutions du sud de la Méditerranée. The Economist dans un article sur le bilan de lady Ashton fait observer pour sa défense qu’elle ne peut ouvrir la bouche sans s’être assurée au préalable de l’accord des 27 gouvernements de l’UE. La deuxième leçon à tirer de cette crise est l’impossibilité pour l’Europe de faire entendre sa voix au moment opportun tant que règnera la règle de l’unanimité en politique étrangère. Cependant les circonstances étaient exceptionnellement favorables : pas d’oppositions entre Etats membres, attente des opinions, proximité géographique, affirmation de valeurs communes.

27 janvier 2011

Une démonstration des bénéfices de l'unité

Paris, 28 janvier 2011. La première émission obligataire du Fonds européen de stabilité financière a remporté un succès remarquable : 45 milliards d’euros proposés pour 5 attendus. Le FESF bénéficiant du triple A aurait sans doute trouvé preneur pour ses titres en offrant un taux d’intérêt égal à celui qu’obtient l’Allemagne pour ses emprunts. Par prudence et pour garantir le succès de cette première émission, un taux légèrement supérieur a été offert sans que le montant exact soit précisé dans l’article du Monde daté du 27 janvier où je puise cette information. La leçon à tirer de cet épisode est claire. Dés qu’elle se présente comme une unité et non comme une simple alliance précaire l’Europe suscite la confiance. Puissent nos dirigeants s’en souvenir !
Pas de nouveau message avant une quinzaine de jours.

25 janvier 2011

Une campagne pour les Etats-Unis d'Europe

Paris, 25 janvier. La démonstration quasi-quotidienne des insuffisances de l’UE a conduit l’Union européenne des fédéralistes que préside en France Jean-Guy Giraud à prendre l’initiative d’une campagne pour les Etats-Unis d’Europe, se fixant pour objectif 2014, année de renouvellement du Parlement et de la Commission mais aussi centième anniversaire du premier suicide de l’Europe.
Une réunion s’est tenue le 22 janvier en présence de Michel Albert, président d’honneur de l’Union des fédéralistes et animée par Jean-Guy Giraud, à laquelle assistaient des représentants de diverses associations, dont ARRI, ainsi que Virgilio Dastoli, ancien proche collaborateur d’Altiero Spinelli et actuellement président du Mouvement européen d’Italie. Elle a fait apparaître un accord quasi-unanime sur la formule des Etats-Unis d’Europe à la condition que soit mis en avant le principe de solidarité qui distingue notre Union de la fédération américaine.
L’effort accompli pour surmonter la crise et améliorer la gouvernance économique de l’Union (fonds de stabilisation, agences de supervision, semestre européen), si important soit-il n’est pas suffisant pour garantir à terme la solidité de l’union monétaire et répondre aux attentes des peuples. Il reste à doter l’Union de ressources propres, à autoriser le recours à des emprunts européens, pas seulement pour alléger le fardeau des pays en difficulté mais aussi assurer au programme 2020 un meilleur sort que celui qu’a connu l’agenda de Lisbonne, à perfectionner la gouvernance économique en procédant à des assainissements budgétaires assez progressifs pour ne pas briser la reprise, enfin à réguler les marchés financiers et à amorcer l’harmonisation de la fiscalité des entreprises. J’ai personnellement appelé l’attention sur l’opportunité d’un programme intégré en faveur des jeunes sans emploi qui pourrait combiner les moyens de la politique sociale, de la formation professionnelle et des encouragements aux échanges transnationaux, programme qui donnerait de l’Europe une image positive.
L’allergie des gouvernements à la réouverture du chantier institutionnel n’a pas empêché Angela Merkel d’obtenir l’élaboration d’un amendement aux traités. Notre conviction est qu’il est temps de préparer une nouvelle étape sur la route qui doit conduire notre continent à son unité politique, étape qui pourrait se situer symboliquement entre les dates anniversaires du premier conflit mondial né en Europe de la division des Européens. Parmi les réformes institutionnelles, la plus importante concerne l’abolition en tous domaines du droit de veto, étant entendu qu’un pays minoritaire a désormais la faculté de se retirer de l’Union. Ce pourrait être le moyen de s’assurer de la volonté de tous et d’abord des Britanniques de poursuivre l’œuvre entreprise. La proposition du député fédéraliste britannique Andrew Duff prévoyant l’élection d’un petit groupe de députés européens sur des listes transnationales mérite d’être soutenue comme étant de nature à donner un caractère réellement européen à la campagne. La présentation par les principaux partis d’un programme européen et non d’une addition de programmes nationaux et celle d’un candidat pour la présidence de la Commission sont la condition pour une plus forte participation aux élections européennes. Enfin, l’éclatement de la représentation de l’Union et de la fonction exécutive est un facteur de faiblesse qui pourrait être corrigé en réunissant sur la même tête les fonctions de président de la Commission et du Conseil européen, réforme dont Virgilio Dastoli nous a rappelé qu’elle est permise par le traité de Lisbonne.
Il nous reste à faire partager cette conviction d’abord en France avant d’aborder le débat au niveau européen. J’ai proposé que nous nous adressions au Mouvement européen - France dont c’est la vocation, afin de savoir s’il serait disposé à promouvoir ce projet, à fédérer les initiatives et à porter le débat au niveau européen. Au vu de sa réponse, nous apprécierons quelle suite donner à notre action.

19 janvier 2011

Excès en divers domaines

Paris, 19 janvier. L’actualité fournit en ce moment maints exemples de prises de position excessives qui nuisent à une bonne appréciation des problèmes. Ainsi, le régime de Ben Ali, tout policier qu’il fût, était moins oppressif et moins éloigné de nos valeurs, notamment pour le sort fait aux femmes, que la plupart des régimes arabes. De là à lui proposer une aide en matière de maintien de l’ordre avec les meilleures intentions du monde mais au pire moment… Est-ce appeler au protectionnisme que s’étonner de voir les Chinois construire des autoroutes en Pologne alors que le marché chinois des autoroutes est fermé aux entreprises européennes ? Enfin, doit-on stigmatiser le gouvernement hongrois avant de connaître les amendements qu’il se déclare prêt à apporter à une loi sur les médias, suivant les observations de la Commission européenne ?

13 janvier 2011

Ne prenons pas à la légère la campagne contre l'euro

Paris, 13 janvier. Il ne suffit pas de décrire la catastrophe économique, sociale et politique que représenterait l’éclatement de la zone euro pour contrecarrer la campagne lancée par la coalition des nationalistes d’extrême droite et d’extrême gauche, de Le Pen à Mélanchon en passant par Dupont-Aignan. La seule réponse convaincante serait un vrai saut en avant vers une Europe politique capable d’unir discipline et solidarité. L’Europe ne pourra reconquérir l’appui de ses citoyens si elle ne leur apporte d’autres réponses à leurs attentes que plus d’austérité sans contrepartie positive. Voilà pourquoi l’affaire des euro-obligations susceptibles de financer le programme 2020 n’est pas une affaire technique mais un projet essentiellement politique. C’est ce qu’ont compris le président de l’eurogroupe et, sur un autre registre, les parlementaires européens promoteurs de l’initiative Spinelli.

05 janvier 2011

L'euro se porte bien mais son image n'est pas ce qu'elle devrait être

Platier, 5 janvier. Une rectification d’abord. Un lapsus dans mon dernier message m’a fait désigner faussement météor au lieu de médiator le médicament mortifère des laboratoires Servier.
Concernant l’euro, rien n’est plus ridicule que les commentaires apitoyés sur un euro menacé alors que son cours exprimé en dollar se maintient largement au dessus de son cours d’introduction. Ce qui est remarquable au contraire, c’est la stabilité dont a fait preuve la monnaie unique en ces temps de crise. En revanche, à propos de l’entrée de l’Estonie dans la zone euro, des regrets justifiés se sont exprimés au sujet des images abstraites de ponts ou de portes imaginaires figurant sur les billets, come si l’on avait voulu donner à la monnaie unique une connotation technocratique. Je suis de ceux qui, en son temps, avaient regretté l’incapacité des créateurs de l’euro à se mettre d’accord sur une liste de grandes figures européennes qui auraient fait des nouveaux billets une illustration de nos gloires communes. L’objection de la difficulté d’un accord ne tient pas. Il suffisait de confier le choix à un panel de personnalités prestigieuses et de prévoir un renouvellement périodique des images sélectionnées.

03 janvier 2011

Pour une Europe plus efficace

Platier 3 janvier 2011 Parmi mes vœux de l’an dernier deux se sont en partie réalisés : l’unité des Européens sur les problèmes du climat et la régulation des activités bancaires. Reste à rendre l’Europe plus efficace en dépassant le stade de la simple coopération. Un exemple d’actualité nous est fourni par le scandale du météor médicament inutile et nuisible. Or il existe une agence européenne du médicament. Nul journaliste, nulle personnalité politique ne s’est demandé si l’agence européenne était intervenue dans cette affaire. Sans disposer d’informations particulières, je soupçonne les gouvernements des pays disposant d’une industrie pharmaceutiques d’être peu disposés à voir un organisme européen indépendant se prononcer sur l’efficacité et l’innocuité des médicaments. Si l’on en croit les praticiens réunis la semaine dernière dans un débat de l’excellente émission C dans l’air de la chaîne 5, la moitié des médicaments existants seraient totalement dépourvus d’utilité. Beaucoup d’entre eux seraient nuisibles. Qu’attend l’Europe pour faire entendre sa voix ?
Meilleurs vœux à mes correspondants et mes excuses pour les difficultés d’accès à mes messages entre août et décembre dernier.