30 juillet 2009

Une taxe carbone européenne serait mieux acceptée

Platier, 30 juillet.
Parmi les questions que pose la création d’une taxe sur les émissions de CO 2, il en est une à laquelle aucune réponse vraiment satisfaisante n’est apportée. Il s’agit de mettre en œuvre un programme européen. Il est important de connaître les intentions de nos partenaires, ne serait-ce que pour s’assurer qu’il n’y aura pas de distorsion de concurrence. Une taxe carbone européenne n’aurait pas contribué à rendre l’Europe populaire mais aurait été mieux acceptée. Le maintien de l’unanimité pour toute décision en matière fiscale qui vient d’être confirmé à la demande des Irlandais est l’un des principaux freins au développement de politiques communes répondant aux défis sociaux et environnementaux. Reconnaissons aux socialistes français, que j’ai critiqué lors de mon précédent message, le mérite d’avoir osé poser le problème de l’impôt européen.

23 juillet 2009

Un Polonais préside le Parlement européen

Platier, 23 juillet.
L’élection d’un ancien Premier ministre polonais, ancien de Solidarnosc, à la présidence du Parlement est le signe heureux de l’intégration des anciennes nations captives dans la famille européenne. Jerzy Buzek a été élu à une très large majorité grâce à l’accord qui conduit traditionnellement les deux principaux groupes à se partager les cinq ans de présidence. Cet accord, désormais traditionnel, est mal compris en France où on y voit une compromission fâcheuse entre Droite et Gauche. C’est ne rien comprendre à la culture de compromis sans laquelle le Parlement serait impuissant face au Conseil et à la Commission. Aucun groupe ne disposant de la majorité absolue nécessaire pour l’adoption d’un texte, le rapprochement des points de vue s’impose. L’expérience a montré que la recherche d’un accord sur des sujets conflictuels (directive services, règlement sur la chimie) était parfois plus efficace au Parlement qu’au Conseil. En se dissociant de leur groupe et en s’abstenant, alors même qu’ils reconnaissaient les qualités personnelles de Jerzy Buzek, les socialistes français ont commis une lourde erreur qui aura pour effet d’affaiblir un peu plus leur influence.

16 juillet 2009

Hommage à Pierre Gerbet et Jean-Pierre Gouzy

Platier, 16 juillet.
L’un nous a quitté, l’autre est bien vivant. Tous deux ont été, dans des registres différents, des constructeurs de l’Europe. Pierre Gerbet, décédé subitement il y a quelques jours au cours d’un voyage en Europe centrale, aura été l’un des meilleurs historiens de la construction européenne. Nous avions fait équipe à Sciences Po dans les années soixante-dix et il m’avait beaucoup soutenu et encouragé lors de la création de l’AFEUR. Il m’avait accompagné quand nous avons rejoint ARRI. Jean-Pierre Gouzy est un très ancien et toujours actif militant européen. Il s’honore d’avoir participé au congrès fondateur de La Haye en mai 1948. Militant de conviction fédéraliste, ancien président de l’association des journalistes européens, vice-président de la Maison de l’Europe de Paris, il vient de publier aux Editions de Paris une « Histoire de l’Europe » appelée à devenir un ouvrage de référence. Les générations plus jeunes y trouveront une mine d’informations sur les combats de leurs devanciers, les raisons des succès comme celles des déceptions.
L’installation du nouveau Parlement et l’élection de son président ont donné lieu à plus d’attention des médias et à des commentaires souvent contestables. Ce sera l’objet de mon prochain message.

07 juillet 2009

Deux informations inaperçues

Platier, 7 juillet.
Presque simultanément deux informations nous sont venues d’Allemagne qui méritent réflexion bien qu’elles aient été peu commentées dans les médias français. D’une part la chancelière Angela Merkel a fait adopter une disposition constitutionnelle imposant le retour à l’équilibre des finances publiques allemandes d’ici à 2016. D’autre part, le tribunal constitutionnel de Karlsruhe, tout en autorisant la ratification du traité de Lisbonne, semble fermer la porte à tout nouvel élargissement des compétences communautaires, notamment dans le domaine de la sécurité intérieure. Ce dernier point reste à préciser à la lumière de la décision qui, à ma connaissance, n’a pas été publiée en français. Il n’en demeure pas moins que la divergence croissante entre une tendance allemande au raidissement solitaire et une propension française à toujours plus d’endettement également solitaire annonce des lendemains difficiles. Il fut un temps où l’Allemagne multipliait des propositions fédéralistes que la France ignorait alors qu’elles nous eussent garantis contre la dérive vers la zone d’échanges sans contenu politique. Que d’occasions perdues ! Combien d’humiliations devront subir les Européens avant de comprendre que l’Europe de la simple coopération intergouvernementale n’est qu’une forme trompeuse de la non-Europe ?

03 juillet 2009

Congrès et remaniement. Des perspectives inquiétantes

Platier, 3 juillet.
On ne peut que se féliciter de la volonté d’action du président de la République, celle notamment d’engager enfin cette réforme territoriale recommandée tour à tour par les commissions Attali et Balladur et qui n’a que trop tardé. Mais comment ne pas s’inquiéter de l’absence totale de la dimension européenne moins d’un mois après le renouvellement du Parlement? Les thèmes d’un emprunt destiné, entre autres, à la recherche et à la croissance verte appelaient une proposition à l’échelle de l’Europe. Au niveau d’endettement où nous sommes, il ne serait pas inutile de faire appel à la capacité d’emprunt très sous-utilisée des institutions européennes. Mais l’essentiel n’est pas là. L’essentiel est d’éviter des plans d’investissement nationaux non coordonnés donc moins efficaces, psychologiquement moins bien acceptés et générateurs de contentieux car sources potentielles de graves distorsions de concurrence. De surcroît, un conflit avec l’Allemagne et la BCE est prévisible si nous renonçons à l’assainissement de nos finances et comptons sur l’inflation pour alléger nos dettes. Mieux vaudrait un affrontement avec nos voisins sur l’emprunt communautaire et l’élargissement du budget européen aujourd’hui qu’un conflit demain sur l’inflation ! Autre souci pour les relations franco-allemandes : était-ce bien le moment de déplacer Le Maire dont chacun reconnaissait les aptitudes et les succès dans ce domaine et de le remplacer par un homme certes brillant et aux fortes convictions, à vrai dire plus atlantiques qu’européennes, mais dont on se demande s’il sera un bon avocat auprès de Bruxelles et de Berlin ?