26 juillet 2007

Des infirmières bulgares à l'union méditerranéenne

Platier 26 juillet 07 On ne peut que se féliciter de la libération des otages de Kadhafi et juger mal venus les commentaires sur ce qui n’est après tout que la cessation tardive d’un crime d’Etat. Plutôt que d’ergoter sur l’intervention de Cécilia dont le rôle semble avoir été fort utile, on peut se satisfaire que l’impression de récupération des efforts européens soit relativisée par la présence de la Commissaire aux relations extérieures et les félicitations de Barroso. Cette affaire donne l’occasion de s’interroger sur le projet d’union méditerranéenne du Président de la République. Deux observateurs avisés des affaires européennes, l’italien Toscano et le portugais Vasconcelos ont récemment souligné que la situation en Méditerranée intéressait tous les Etats membres et que le rôle de l’UE était de les impliquer tous dans le progrès et la stabilisation de la région. Toute initiative fractionnelle d’une union méditerranéenne qui ne comprendrait que certains pays de l’UE serait contre-productive. Que dirions-nous si l’Allemagne proposait une union sous son égide des nouveaux Etats membres de l’Est et des pays issus de l’ex URSS ?

14 juillet 2007

Une avancée méconnue de la Défense européenne

Platier 14 juillet
L'heureuse initiative consistant à inviter des contingents de tous les pays membres de l'Union à participer au défilé du 14 juillet est une occasion de signaler la reprise dans le projet de traité réformateur des dispositions concernant la défense commune qui figuraient dans le traité constitutionnel, notamment la clause générale de solidarité. Ce point important a été généralement négligé par les commentateurs à l'exception de l'excellent éditorialiste de l'Agence Europe Ferdinando Riccardi.

Le scandale des infirmières bulgares

Platier 13 juillet
Il est difficile de comprendre la faible mobilisation de l’opinion en faveur des infirmières bulgares et du médecin palestinien condamnés à mort en Lybie pour le crime totalement invraisemblable, et auquel, hors de la Libye, nul ne croit, d’avoir volontairement inoculé le sida à plusieurs centaines d’enfants. Les victimes de ce chantage judiciaire dont l’objet est, pour le gouvernement de Tripoli, de récupérer les sommes versées aux victimes de l’attentat de Lockerbie fomenté, selon toute vraisemblance par des agents libyens, devrait donner lieu à une solidarité sans faille de l’UE dont la Bulgarie est devenue membre le 1er janvier dernier. On attend le résultat du voyage à Tripoli de Cécilia Sarkozy qui a pu rencontrer les infirmières et a eu un entretien avec Kadhafi. On s’étonne que les médias portent plus d’intérêt au rôle de l’épouse du Président qu’au sort de ces cinq innocents retenus depuis huit ans dans les geôles libyennes et plusieurs fois condamnés à mort. Nul ne semble trouver à redire à l’aveu de culpabilité que sera tout versement d’une compensation financière aux familles des enfants libyens contaminés. Verser une aide humanitaire, oui, une compensation ou une indemnisation, non !

06 juillet 2007

Attention au dérapage budgétaire !

Platier 6 juillet 07 L'euphorie du succès de Bruxelles facilité par une heureuse harmonie franco-allemande ne doit pas dissimuler le risque d'un refroidissement provoqué par le laxisme budgétaire sarkozyen. Le Financial Times se fait un plaisir d'annoncer le prochain refroidissement des relations entre Paris et Berlin sur ce thème. Le discours français sur la gouvernance de la zone euro, et plus encore sur l'Europe protectrice, ne sera crédible que quand nous aurons mis nos affaires en ordre. La création d'un haut représentant pour la politique étrangère au double rattachement au Conseil et à la Commission suggère que l'Union pourrait se doter d'un autre haut représentant pour la zone euro qui serait aussi l'interlocuteur de la Banque centrale. C'est ce que parait souhaiter celle-ci.

03 juillet 2007

Une relance sans élan

Platier 3 juillet 07

Que retenir des multiples commentaires, souvent contradictoires, relatifs à l’accord péniblement arraché à Bruxelles grâce aux efforts d’une Chancelière allemande d’exception, secondée par l’activisme de notre nouveau Président ?

On peut d’abord se réjouir que la quasi-totalité des réformes juridiques et institutionnelles contenues dans le défunt traité constitutionnel aient été préservées. Mais ce succès a été payé d’un prix élevé qui justifie la mauvaise humeur exprimée par Jean-Claude Juncker, Romano Prodi et Guy Verofstadt. Contrairement à l’obstination des frères Kaczinski qui a fini par céder au prix d’un délai de dix ans pour l’abandon des pondérations de Nice, celle de Tony Blair au fond moins fondée a eu presque entièrement gain de cause.

Rappelons d’abord les réformes acquises : l’extension du domaine des décisions qui échappent à l’exigence paralysante de l’unanimité, notamment en matière de police et de justice, l’extension corrélative des pouvoirs de codécision du Parlement, la référence à la Charte des droits fondamentaux dont le caractère juridiquement contraignant est admis par tous les Etats, à la seule exception peu glorieuse de la Grande-Bretagne, la reconnaissance de la personnalité juridique de l’Union, l’octroi de la présidence du Conseil européen à une personnalité n’exerçant pas de fonctions nationales pour un mandat renouvelable de deux ans et demie, l’attribution au haut représentant pour les Affaires étrangères et la Défense de la position (double rattachement au Conseil et à la Commission, des attributions et des moyens (service diplomatique), présidence du Conseil des Affaires étrangères par ce Haut-Représentant, la création d’une procédure d’alerte ouverte aux parlements nationaux en vue du respect du principe de subsidiarité, les coopérations renforcées rendues plus faciles.

Le prix qu’il a fallu payer pour ces résultats est double. L’abandon des symboles mais aussi l’absence de toute correction des lacunes et des faiblesses du traité constitutionnel. Tout a été dit sur l’importance des symboles et l’absurdité de leur abandon alors qu’on prétend vouloir rapprocher l’Europe des citoyens. Cet abandon a même un côté ridicule. L’étendard aux douze étoiles continuera d’être arboré, y compris désormais dans toutes les mairies de France sur la photo officielle du président de la République, l’ode à la joie d’être jouée, le 9 mai d’être fêté. Règlements et directives auront toujours valeur contraignante même si elles ne se transforment pas en lois. Cette décision lamentable n’en marque pas moins un recul inquiétant de l’esprit européen, celui qui avait longtemps soutenu les bâtisseurs de l’Europe.

Tout aussi grave, mais moins souvent soulignée, est l’absence de toute correction, de toute addition positive aux dispositions les plus contestables du traité constitutionnel. On espérait un renforcement des dispositions relatives à l’énergie, au climat, à l’immigration, au social. On pouvait espérer une composition de la Commission assurant mieux son autorité. Au lieu de cela, l’élimination de la mention de la concurrence non faussée des objectifs de l’Union, dont elle demeure un instrument essentiel, apparaît comme une concession heureusement sans portée aux tenants français du non de gauche. Dans la remarquable analyse que Valéry Giscard d’Estaing a donnée au Monde (n° daté du 15 juin), l’ancien président de la Convention aurait pu rappeler qu’il avait consenti à Tony Blair l’énorme concession du maintien du veto en matière fiscale en échange de son accord sur tout le reste. La remise en cause symbolique de l’Europe politique aurait justifié celle du veto fiscal. Cet ultime succès de la diplomatie anglaise pourrait se transformer en victoire à la Pyrrhus. Jamais l’irritation contre le négativisme britannique n’a été aussi vif, ainsi qu’en témoignent les récentes déclarations de Romano Prodi. Si le nouveau premier ministre Gordon Brown devait confirmer sa réputation d’euroscepticisme, une pression pourrait s’exercer sur la Grande- Bretagne en vue de son retrait de l’Union. A défaut, une avant-garde composée des Etats prêts à aller vers une Europe plus intégrée et plus politique mais demeurant ouverte à tous devrait être envisagée. L’attitude positive de la plupart des nouveaux membres, exception faite de la Pologne et de la Tchéquie, laisse espérer que ces pays s’inscriraient dans l’avant-garde. A une diplomatie française délivrée du poids d’un désastreux referendum de faire oublier les propos de Jacques Chirac sur les mal élevés qui avaient perdu une occasion de se taire !